Après deux années de repli sur soi, l’optimisme regagne le secteur de l’événementiel
Le présentiel est de retour, et les événements physiques avec lui. Deux patrons d’agence reviennent sur les opportunités de l’ère (presque) post-Covid.
Depuis quelques mois, il semblerait que le monde vive déjà dans une ère post-Covid. Les festivals ont repris, on se serre, on s’embrasse, on danse ensemble, et cela, malgré le récent rebond épidémique. Bref : après deux années de repli sur soi, l’heure est à l’optimisme. Il faut dire que les chiffres sont encourageants. “L’économie française tourne à plein régime”, a déclaré le ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire en janvier 2022, en réaction au 7% de croissance du PIB français en 2021.
Le secteur de l’événementiel peut enfin rêver à des jours meilleurs. Adieu le distanciel, l’heure est au présentiel. Pour preuve, Google, Microsoft ou encore Twitter, qui avaient été les premiers à adopter le télétravail, rivalisent désormais d'inventivité pour faire revenir leurs salariés au bureau : dégustation de vins, concert de rap ou parties d'échecs à taille humaine, tout est bon pour se retrouver, et développer de nouveaux projets.
La reprise est là, et les changements aussi !
“La reprise de l’activité a explosé”, nous confie Antoine Dray, fondateur de l’agence A.D.R. Selon lui, “le pic de production et d’envie” a été lancé par le Festival de Cannes de juillet 2021. “C’était un signal très positif envoyé à toute l’industrie. Le Festival de Cannes, c'est à la fois le monde de la nouvelle technologie, de la culture, de l'entertainment, des marques de luxe. Ils ont vraiment donné le "la" à l'ensemble de la profession”, précise-t-il. L’entrepreneur évoque même une certaine forme de solidarité qu’il n’avait jamais expérimenté auparavant, “non seulement de la part des marques, mais aussi avec l'ensemble de nos partenaires, de nos concurrents.” Pour Christophe Pinguet, fondateur de l’agence Shortcut, le constat est le même : la reprise est là, et bien là. “Il y a une vraie reprise. C’est un vrai chaos d’agenda mais qui n’est la faute de personne, c’est l’addition de projets qui arrivent ensemble. Depuis septembre 2021, on a constamment une trentaine de briefs en cours”, explique-t-il.
Bonne nouvelle puisque comme le souligne Antoine Dray, la crise sanitaire a été “un choc” pour l’événementiel où tout s’est arrêté du jour au lendemain. Mais son agence a tenu bon et s’est adaptée. Ne pouvant plus accompagner les annonceurs en conseil artistique, A.D.R s’est focalisée sur les conseils stratégiques. Du côté de Shortcut, bien que la crise “n’ait pas été trop mal vécue", quelques ajustements ont été nécessaires. “Certaines entreprises n’ont pas pu arrêter de faire de l’événementiel. Les assemblées générales du CAC 40 par exemple, il a fallu trouver des palliatifs pour les faire exister autrement. On a conseillé à nos clients de maintenir la communication par des événements, même avec un ou deux speakers mais en investissant dans des décors sublimes”, se souvient Christophe Pinguet.
Plutôt que de broyer du noir, l’agence A.D.R a décidé d’innover et de préparer l’après-crise. “Parallèlement, on a créé notre propre studio de métavers. C’est un studio dédié à la création et à la production de méta pour nos marques, on y crée des expériences virtuelles complètes et customisables”, ajoute-t-il.
En interne aussi, ces deux années ont été l’opportunité d’innover et de redéfinir certains objectifs. “On a souhaité activer davantage notre politique RSE et on est donc certifié ISO 21 121. On a mis en place des procédures et consacré le principe de l’amélioration continue”, explique-t-il.
Digital, main-d’oeuvre et gestion du planning : les nouveaux défis
Reprise économique signifie-t-elle pour autant un optimisme béat de la part des annonceurs ? Pas nécessairement, puisque cette période intense apporte aussi son lot de défis. “La prise de décision est un peu plus longue qu'auparavant. Les annonceurs ont besoin d'être accompagnés pour bien comprendre où ils vont aller, pour quelle vision opter et pour quelle audience. Mais c'est à nous de les conseiller, de jouer notre rôle d'agence”, indique Antoine Dray.
Après deux années à distance, l’un des principaux challenges des agences événementielles est de trouver l’équilibre entre présentiel et digital. Antoine Dray confirme : “On a envie de pérenniser à la fois le digital mais aussi le storytelling vécu. Avant, on parlait de phygital pour compenser. Maintenant on en parle pour augmenter.” Et Christophe Pinguet de compléter : “Il y a une sorte de retour. Avant il fallait de l’audiovisuel, on a alors créé des formats hybrides. À nous aussi de faire en sorte que le digital soit aussi cool qu’une émission de télévision !”.
Ce pic de production a aussi quelques conséquences malheureuses. Comme dans la restauration ou l’hôtellerie, l'événementiel est victime d’une pénurie de main-d'œuvre, “alors qu’il y a 30% d’événements en plus !”, s’exclame Antoine Dray. Même chose du côté des matières premières. Le fondateur d’A.D.R raconte : “pendant le festival de Cannes, on a souffert du manque de bois et de quantités de matériel bloqué dans le port de Shanghaï.” Sans parler de la gestion du planning qui, à cause de la suractivité, peut devenir un sérieux casse-tête.
Malgré ces deux années de crise sanitaire, Christophe Pinguet qui se surnomme lui-même “le roi de l’optimisme”, positive. Et souligne l’opportunité de renouveau pour son agence : “le Covid a permis de nous bonifier. L’agence existe depuis 25 ans, on était sur un rythme de croisière. Le Covid a merveilleusement rénové notre métier. Cela nous a donné un bon coup de pied aux fesses !”. L’occasion de repartir sur de nouvelles bases pour affronter les prochains défis qui ne manqueront pas de survenir !