Open Air : ces initiatives sont-elles la clef du secteur cet été ?

Alors que le Royaume-Uni et Israël déconfinent prudemment tourisme et events, en Allemagne, aux États-Unis, en Italie, en Albanie et en France, les organisateurs d’événements redoublent de créativité pour réinventer des manifestations culturelles en plein air.

Open Air : ces initiatives sont-elles la clef du secteur cet été ?

Maxime Bhm - Unsplash

Alors que le Royaume-Uni et Israël déconfinent prudemment tourisme et events, en Allemagne, aux États-Unis, en Italie, en Albanie et en France, les organisateurs d’événements redoublent de créativité pour réinventer des manifestations culturelles en plein air.

« À l’été 2020, on a vu naître le club éphémère Border City, qui a mené une expérience unique en faisant danser des milliers de personnes en plein air à Aubervilliers. En 2021, on aimerait qu’il y ait dix Border City !», raconte Frédéric Hocquard, maire adjoint du tourisme et de la nuit à Paris. Rooftops, gares, cours, hippodromes, parcs de château, berges, friches… Autant de lieux répertoriés dans une carte publiée en février 2021 que la Mairie de Paris appelle à investir.

Une certitude demeure : les acteurs de l’événementiel sont dans les starting blocks pour faire de cet été un Summer of Events.

« On a tout intérêt à mettre en place des espaces un peu partout pour accueillir différents types de fêtes » - et d’évènements - martèle Kevin Ringeval, fondateur de l’Aérosol, producteur des nuits 3672 et membre du conseil d'administration de Technopol. Cet acteur important de la nuit parisienne va même jusqu’à imaginer ce qu’il appelle des « zones d’urgence temporaire de la fête », des lieux « qui garantiraient la sécurité des publics sur la base des recommandations de l’État ». Outre l’observation des gestes barrière et la relance d’un secteur évènementiel déjà bien fragilisé, de tels endroits pourraient accompagner la campagne de dépistage et de vaccination nécessaire pour sortir du COVID. Pourquoi pas imaginer des sas de dépistage à l’entrée, suivis de stands de vaccination à qui le souhaite ?

Une idée qui a peut-être inspiré le festival WeLoveGreen dont le public habituel a clairement exprimé ses velléités pour l’été dans un sondage. A 88%, les personnes interrogées déclarent être prêtes à présenter à l’entrée du festival, le résultat négatif d’un test PCR ou antigénique.

Pour poursuivre notre investigation, nous sommes allés à l’étranger - et au bord du périph’ parisien - pour chiner des événements en plein air que nous espérons voir fleurir.


Sur le stade « abandonné »

L’été, en Allemagne, le long de la Mer baltique et de la Mer du Nord, sur le sable - pas toujours chaud -, les vacanciers paressent dans des Strandkörbe, littéralement des « paniers de plage », de très hautes bergères en osier qui protègent du vent et du sable. Quelques grandes villes d’Allemagne accueilleront le Strandkorb-Festival. Sur un large espace en plein air - stades, tarmacs d’aéroport ou parcs - s’étendent des lignes de « paniers de plage », armés de désinfectant, de vivres et de bières fraîches, face à une scène sur laquelle des concerts ou happenings se succèdent. Ce festival qui a débuté l’été dernier dans une version pilote dans une seule ville et séduit 50 000 spectateurs posera ses « Strandkörbe » dans une douzaine de villes d’outre-Rhin.

Strandkorb-Festival

Entre périph’ et canal

Dans la famille « lieux hybrides et innovants », je demande Kilomètre 25. Cet espace à l’air libre de 2200m2 verra le jour aux portes de l’été sous la bannière de Glazart et de Jardin 21. Le lieu est particulièrement étonnant puisqu’il s’étend en dessous du périphérique parisien et au bord du Canal de l’Ourcq. Kilomètre 25 accueillera des conférences, des ateliers, des projections, des cours sportifs, des pop up stores de créateurs ou des foodtrucks tous les jours… si les conditions sanitaires le permettent.


Le drive-in est politique et festif

En Albanie, la campagne électorale des législatives bat son plein dans un pays toujours tenu en apnée par les restrictions imposées par la crise sanitaire. Pourtant les meetings politiques ont encore bien lieu. Si le Parti socialiste local n’a pu réunir que quelques dizaines de militants sur une place en plein air et en respectant la distanciation sociale, le parti démocrate a imaginé un meeting en drive-in. Les adhérents ont donc assisté au meeting de leur voiture, bannières au vent.

À défaut de généraliser l’accès au divertissement live dans des bulles de plastiques géantes, on voit fleurir depuis un an en Lituanie, en Allemagne ou en Italie, les concerts et les séances de cinémas en drive-in, voire en « bike-in ». Aux États-Unis, une autre tendance a explosé en Californie : le drive-thru ou drive-into. Sur le même principe que les safaris, à l’abri de leur voiture, les spectateurs s’enfoncent dans l’univers d’une série Netflix (le Stranger Things Drive-into), assistent à des ateliers du Père Noël (The Elf on the Shelf’s Magical Journey) ou participent à un délire psychédélique en lumières, sons et effets visuels (Insomniac’s Electric Mile).

Insomniac’s Electric Mile

Keep walking

« Demeurer le moins possible assis : ne prêter foi à aucune pensée qui n’ait été composée au grand air, dans le libre mouvement du corps – à aucune idée où les muscles n’aient été aussi de la fête », écrivait Nietzsche dans Ecce Homo. Autrement dit, seules les pensées qui nous viennent en marchant sont valables. Une idée qui remonte à l’Antiquité : Platon et Aristote philosophaient en marchant. L’idée a dû inspirer à Coventry au Royaume-Uni qui accueillera un été une performance de « théâtre marché » mettant en scène une rue, ses habitants et ses commerçants, Theatre of Wandering.

Colonies, Frédéric Deslias

Cette même approche a d’ailleurs été revisitée par le metteur en scène Frédéric Deslias et l’écrivain de science-fiction Norbert Merjagnan qui ont travaillé dans les locaux et les extérieur de l’ENS-Paris-Saclay pour concevoir un spectacle « ambulant », #Colonie.s dont le principe est «l’exploration in situ [par la fiction] d’une expérience de survie et d'écopoïèse (la fabrication d'un écosystème durable sur une planète initialement stérile et sans vie, ndlr) dans colonie spatiale abandonnée. Dans un projet précédent où les spectateurs étaient eux aussi acteurs, équipés d’une combinaison spatiale, dans #Exoterritoires, le duo proposait un événement similaire d’art-sciences, à cheval entre le plein air et l’indoor, dans une démarche d’itinérance urbaine pour découvrir des réalités parallèles et des projections futuristes.

Conférences ambulantes en ville comme à la campagne, double forfait « concert + vaccination » en festival, ilots de rassemblement en micro-comité dans des paniers plages, séminaire en bike-in et zones d’urgence temporaire de la fête dans les friches urbaines… l’été événementiel sera chaud. On a hâte de le vivre.